Brexit : chômage temporaire pour les employeurs en difficulté

Auteur: Catherine Mairy (Legal Expert)
Temps de lecture: 9min
Date de publication: 17/03/2021 - 08:16
Dernière mise à jour: 01/04/2021 - 15:02

Les employeurs soumis à des difficultés économiques à la suite du retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne (Brexit) peuvent recourir à un système spécifique de chômage temporaire.

Il s’agit là de l’une des trois mesures temporaires de crise prévues par la loi du 6 mars 2020 en faveur de ces employeurs, qui sera en vigueur du 22 mars 2021 au 21 mars 2022.

En voici une présentation succincte.

Employeurs concernés

Le système spécifique de chômage temporaire s'applique aux employeurs du secteur privé qui rencontrent des difficultés économiques en raison du Brexit.

Sont visés, les employeurs reconnus par le ministre de l'Emploi comme étant affectés par une réduction d'au moins 5 % de leur chiffre d'affaires, de leur production ou de leurs commandes à la suite du retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne.

Conditions d’application

Pour pouvoir appliquer le système spécifique de chômage temporaire, l’employeur doit :

  • d’une part, être lié en principe par une convention collective de travail (CCT) ;
  • et, d’autre part, être reconnu comme employeur en difficulté.

Conclusion d’une CCT et introduction d’une demande de reconnaissance

L’employeur en difficulté doit être lié par une CCT conclue au sein de la commission paritaire compétente.

A défaut d’une telle CCT, il doit être lié :

  • s’il existe une délégation syndicale dans l’entreprise : par une CCT d’entreprise déposée au greffe de la Direction générale des Relations collectives de travail (SPF Emploi, Travail et Concertation sociale) au plus tard dans les 5 jours ouvrables suivant la date à laquelle la CCT a été conclue.

Attention ! Si aucun résultat n'est atteint dans les 2 semaines suivant le début des négociations (initiées par l’employeur), l'employeur doit uniquement être lié par une demande de reconnaissance comme employeur en difficulté approuvée.

  • en l’absence de délégation syndicale dans l’entreprise : par une demande de reconnaissance comme employeur en difficulté approuvée ou par une CCT d’entreprise déposée au greffe de la Direction générale des Relations collectives de travail (SPF Emploi, Travail et Concertation sociale) au plus tard dans les 5 jours ouvrables suivant la date à laquelle la CCT a été conclue.

Contenu de la CCT

La CCT (sectorielle ou d’entreprise) doit mentionner :

  • le fait qu'elle est conclue en application du titre 2 de la loi du 6 mars 2020 ;
  • la mesure temporaire de crise visée, soit le système spécifique de chômage temporaire ;
  • la durée de la suspension totale du contrat de travail ou du régime de travail à temps réduit ;
  • le montant du supplément aux allocations de chômage payé au travailleur mis en chômage temporaire ;
  • des mesures pour le maintien maximal de l'emploi.

Contenu de la demande de reconnaissance et procédure

La demande de reconnaissance comme employeur faisant face à des difficultés économiques en raison du Brexit doit mentionner :

  • le fait qu'elle est rédigée en application de la loi du 6 mars 2020 ;
  • la mesure temporaire de crise souhaitée, soit le système spécifique de chômage temporaire ;
  • la durée de la mesure ;
  • le supplément aux allocations de chômage payé au travailleur mis en chômage temporaire ;
  • des mesures pour le maintien maximal de l'emploi.

L’entreprise introduit la demande de reconnaissance (par voie postale ou par voie électronique) via un formulaire-type auprès du service compétent du SPF Emploi, Travail et Concertation sociale ; cela peut se faire au même moment que le dépôt de la CCT au greffe.

Dans cette demande, l’employeur apporte la preuve qu'il est affecté par une diminution d'au moins 5 % du chiffre d'affaires, de la production ou des commandes à la suite du Brexit ; concrètement, il doit faire la comparaison entre les données d'un des 2 mois précédant la demande de reconnaissance et le mois correspondant de l'une des 2 années calendrier précédant la demande.

Remarque – L’employeur transmet une copie du formulaire de reconnaissance ainsi que les raisons économiques justifiant l'utilisation de la mesure au conseil d'entreprise ou, à défaut, à la délégation syndicale.

La suite de la procédure peut être résumée comme suit :

  • la demande est transmise à la commission « Plans d'entreprise » immédiatement ;
  • cette commission rend un avis motivé dans les 2 semaines après la réception de la demande ;
  • cet avis est transmis au ministre de l'Emploi immédiatement ;
  • cet avis est également transmis à l’employeur qui le communique, dans les plus brefs délais, au conseil d'entreprise ou, à défaut, à la délégation syndicale ;
  • le ministre de l'Emploi prend une décision motivée sur la reconnaissance après réception de l’avis (mesure visée, durée de la reconnaissance, montant du supplément aux allocations de chômage) ;
  • cette décision est notifiée à l'employeur immédiatement ;
  • l’employeur transmet une copie de la reconnaissance ainsi que les raisons économiques  justifiant l'utilisation de la mesure au conseil d'entreprise ou, à défaut, à la délégation syndicale.

L’ONEm et l’ONSS sont également informés du nom de l’employeur ainsi reconnu, de la mesure visée et des dates de début et de fin de la reconnaissance.

Système spécifique de chômage temporaire collectif 

Chômage économique pour les ouvriers

Pendant la période de reconnaissance, l'employeur peut mettre en chômage économique les ouvriers :

  • soit dans le cadre d’un régime de suspension totale du contrat de travail : la durée maximale est fixée à 8 semaines (au lieu de 4 semaines normalement) ;
  • soit dans le cadre d’un régime de travail à temps réduit ; s’il s’agit du régime « grande suspension » (soit moins de 3 jours de travail/semaine, soit moins d’une semaine de travail sur 2 semaines avec au moins 2 jours de travail), la durée maximale est fixée à 6 mois (au lieu de 3 mois normalement).

Les autres règles du système général (classique) de chômage économique pour les ouvriers s’appliquent de manière inchangée :

  • obligations préalables (ex. celle relative à l’octroi de certains jours de repos compensatoire) ;
  • formalités ;
  • etc.

Par ailleurs, l’employeur doit payer, à l’ouvrier mis en chômage économique, un supplément aux allocations de chômage d’un montant de 5,63 EUR minimum par jour de chômage (sauf si ce paiement est mis à charge d’un fonds de sécurité d'existence).

Des informations complémentaires sont disponibles sur le site www.onem.be.

Chômage économique pour les employés

Pendant la période de reconnaissance, l'employeur peut mettre en chômage économique les employés :

  • soit dans le cadre d’un régime de suspension totale du contrat de travail : la durée maximale est fixée, par année civile, à 8 semaines calendrier (au lieu de 16 semaines calendrier normalement) ;
  • soit dans le cadre d’un régime de travail à temps réduit comportant au moins 2 jours de travail/semaine : la durée maximale est fixée, par année civile, à 13 semaines calendrier (au lieu de 26 semaines calendrier normalement).

Les autres règles du système général (classique) de chômage économique pour les employés s’appliquent de manière inchangée :

  • obligations préalables (ex. octroi de certains jours de repos compensatoire) ;
  • formalités (à partir de la communication prévisionnelle aux (représentants des) travailleurs et au bureau de chômage) ;
  • etc.

Par ailleurs, l’employeur doit payer, à l’employé mis en chômage économique, un supplément aux allocations de chômage (sauf si ce paiement est mis à charge d’un fonds de sécurité d'existence). Ce supplément est au moins équivalent :

  • au supplément accordé aux ouvriers du même employeur qui bénéficient d’allocations de chômage pour cause de chômage temporaire pour raisons économiques ;
  • ou, à défaut de tels ouvriers, au supplément prévu par la CCT conclue au sein de la commission paritaire dont relèverait l’employeur s'il occupait des ouvriers ;
  • ou, à défaut d'une telle CCT, au montant minimum de 5,63 EUR minimum par jour de chômage.

Attention !

  • Le système spécifique de chômage économique pour les employés n’est pas imputable sur le système général (classique) de chômage économique pour les employés.
  • Les allocations de chômage versées dans le cadre du système spécifique de chômage économique (ouvriers et employés) ne font pas partie du montant total des allocations de chômage pour lesquelles une intervention du fonds de fermeture est prévue.

Des informations complémentaires sont disponibles sur le site www.onem.be.

Sources : loi du 6 mars 2020 visant à maintenir l'emploi après le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne, M.B. 25 mars 2020 ; arrêté royal du 31 janvier 2021 fixant la date d'entrée en vigueur et de la fin de vigueur des titres 1er et 2 de la loi du 6 mars 2020 visant à maintenir l'emploi après le retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne, M.B. 15 février 2021.

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