Licenciement d’une travailleuse enceinte : discrimination fondée sur le sexe

Auteur: Catherine Legardien
Temps de lecture: 6min
Date de publication: 13/08/2018 - 13:19
Dernière mise à jour: 22/11/2018 - 15:44

Ce 22 mai 2015, le tribunal du travail de Mons et Charleroi a rendu une décision condamnant un employeur pour discrimination directe fondée sur le sexe pour avoir licencié une travailleuse ayant été à plusieurs reprises en incapacité de travail suite à des complications liées à des tentatives de maternité.

Ce jugement nous donne l’occasion de rappeler succinctement les règles contenues dans la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre la discrimination entre les femmes et les hommes (= loi-genre).

Que dit le tribunal du travail de Mons et Charleroi ?

Un employeur a licencié une travailleuse suite à des absences répétées pour cause d’incapacité de travail. Les périodes d’incapacité de travail ont fait suite à des complications liées à des tentatives pour avoir un enfant (perte d’un enfant peu après la naissance suivie d’une fausse couche et d’une interruption médicale de grossesse). L’employeur était parfaitement au courant de la situation dans laquelle se trouvait la travailleuse.

Le tribunal du travail de Mons et Charleroi a jugé que ce licenciement ne pouvait être justifié et, par conséquent, constituait une discrimination directe sur la base du sexe au sens de la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre la discrimination entre les femmes et les hommes. Sur la base de cette loi, il a, en outre, condamné l’employeur à payer à la travailleuse des dommages et intérêts d’un montant équivalent à six mois de rémunération.

Que dit la loi-genre ?

Champ d’application

La loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre la discrimination entre les femmes et les hommes interdit la discrimination fondée sur le critère du sexe dans divers domaines dont celui des relations de travail. Elle s’applique notamment aux conditions pour l’accès à l’emploi, aux dispositions et aux pratiques concernant les conditions de travail, la rémunération et la rupture des relations de travail.

Les critères de la grossesse, de l’accouchement, de la maternité et du changement de sexe sont assimilés au critère du sexe.

Distinction/discrimination

Une distinction directe fondée sur le critère du sexe ne constitue pas une discrimination si elle peut être justifiée.

La distinction directe se définit comme étant la situation qui se produit lorsque, sur la base du critère du sexe, une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre personne ne l’est, ne l’a été ou ne le serait dans une situation comparable.

Une distinction directe fondée sur le sexe est uniquement autorisée (et donc ne constitue pas une discrimination directe interdite) si elle peut être justifiée par des exigences professionnelles essentielles et déterminantes.

Il est question d’une exigence professionnelle essentielle et déterminante uniquement :

  • lorsqu’une caractéristique déterminée, liée au sexe est essentielle et déterminante en raison de la nature des activités professionnelles spécifiques concernées ou du contexte dans lequel celles-ci sont exécutées et ;
  • lorsque l’exigence repose sur un objectif légitime et est proportionnée par rapport à celui-ci.

Exemple : Pour un ‘spot’ publicitaire vantant une marque de vêtements pour femmes, une agence de publicité recrute uniquement des mannequins de sexe féminin.

L’agence opère une distinction directe sur la base du sexe. En raison de la nature des activités professionnelles spécifiques, cette distinction pourrait toutefois être justifiée par des exigences professionnelles essentielles et déterminantes.

Il ne s’agirait donc pas d’une discrimination directe (interdite).

Quelques précisions

1. Le travailleur qui s’estime victime d’une discrimination peut déposer une plainte, soit au niveau de l’entreprise, conformément aux procédures en vigueur, soit auprès de la Direction générale Contrôle des lois sociales du Service public fédéral Emploi, Travail et Concertation sociale.

Un groupement d’intérêts ou ‘l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes’ peut également déposer une plainte au bénéfice du travailleur concerné auprès de l’entreprise ou du service qui l’occupe.

2. Le travailleur victime d’un acte de discrimination peut réclamer, devant le tribunal du travail, une indemnisation de son préjudice.

L’auteur de l’acte de discrimination devra verser au travailleur une indemnité correspondant au choix de ce travailleur, soit au dommage qu’il a réellement subi (à charge pour lui de prouver l’étendue de son préjudice), soit à une somme forfaitaire dont le montant est fixé dans la loi.

3. Afin que le travailleur qui s’estime victime d’un acte de discrimination puisse déposer une plainte ou intenter une action en justice sans craindre de représailles de la part de son employeur, il bénéficie d’une protection spéciale.

Concrètement, l’employeur ne peut adopter aucune mesure préjudiciable à son encontre, sauf pour des motifs qui sont étrangers à cette plainte ou cette action.

Vous souhaitez plus d’informations sur la réglementation applicable en matière de discrimination au travail ? Consultez notre article consacré à ce sujet dans le Memento de l’employeur du mois de mai 2015.

Sources : tribunal du travail de Mons et Charleroi, 22 mai 2015, R.G. n°13/758/A ; loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre la discrimination entre les femmes et les hommes, MB. 30 mai 2007.

Auteur : Catherine Legardien

14-07-2015

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