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C’est ce qu’a décidé la Cour constitutionnelle dans un arrêt du 18 octobre 2018. Elle a en effet jugé, suite à une question préjudicielle, que l'article 68 de la loi relative au statut unique viole le principe d'égalité et de non-discrimination car, pour les employés supérieurs, il ne permet pas, pour le calcul de la première partie du délai de préavis liée à l'ancienneté acquise au 31 décembre 2013, l'application d'une clause de préavis qui était valable à cette date.
Un employé « supérieur » dont le contrat de travail conclu avant le 1er janvier 2014 contenait une clause de préavis[1] a été licencié moyennant le paiement d’une indemnité de rupture dans le courant de l’année 2015. L’application de cette clause de préavis donnait droit au travailleur à une indemnité couvrant un préavis de 41 mois et 10 semaines et cela, compte tenu de son ancienneté, son âge et sa rémunération au moment de la rupture.
L’employeur a toutefois refusé d’appliquer cette clause de préavis, au motif qu’elle n’était plus valable. Il invoque à cet effet l’article 68 de la loi relative au statut unique.
L’employé intente une action auprès du tribunal du travail de Gand pour réclamer l’application de la clause de préavis.
Pour rappel, le délai de préavis à respecter en cas de rupture, à partir du 1er janvier 2014, d’un contrat de travail conclu avant cette date est déterminé par l’addition de deux délais :
L’article 68 de la loi relative au statut unique règle la première partie du délai de préavis, liée à l’ancienneté acquise au 31 décembre 2013. En principe, ce délai de préavis est déterminé selon les règles légales, réglementaires et conventionnelles qui étaient applicables au travailleur au 31 décembre 2013.
Toutefois, un régime dérogatoire s’applique aux employés dont la rémunération annuelle brute dépasse 32.254€ (c’est-à-dire, les employés « supérieurs ») : le délai de préavis doit être fixé à un mois par année d’ancienneté entamée en cas de congé donné par l’employeur, avec un minimum de trois mois.
Pour ces employés, la première partie du délai de préavis est donc fixée forfaitairement. L’application de règles dérogatoires conventionnelles n’est pas possible (contrairement à ce qui est prévu pour les employés « inférieurs »). Par conséquent, une éventuelle clause de préavis qui aurait été conclue au moment de l’engagement de l’employé ne pourrait se voir appliquer.
Avant de rendre son jugement, le tribunal de Gand a voulu interroger la Cour constitutionnelle sur la compatibilité de l’article 68 de la loi relative au statut unique avec les articles 10 et 11 de la Constitution.
N’y aurait-il pas, en effet, une discrimination entre les employés supérieurs et les autres travailleurs dès lors que les clauses de préavis conclues par les employés supérieurs ne seraient pas admises par la loi relative au statut unique, contrairement aux clauses de préavis conclues par d'autres travailleurs, puisque, pour ces derniers, leur délai de préavis est notamment fixé en fonction des règles conventionnelles en vigueur au 31 décembre 2013 ?
Selon la Cour, l’article 68 relative au statut unique est clair et univoque. Il dispose que la première partie du délai de préavis est déterminée sur la base des règles légales, réglementaires et conventionnelles en vigueur au 31 décembre 2013. Par contre, il prévoit, pour les employés supérieurs (dont la rémunération annuelle brute est supérieure à 32.254€), un régime dérogatoire qui, en cas de licenciement, détermine la première partie du délai de préavis sur la base d’une formule forfaitaire. Il ne renvoie aucunement à la possibilité d’appliquer d’éventuelles clauses contractuelles de préavis.
Sur la base de cet article, la Cour examine, uniquement concernant la première partie du délai de préavis :
Le raisonnement de la Cour est le suivant.
Avant de licencier un employé supérieur, vérifiez que son contrat ne contient pas une clause de préavis conclue valablement avant le 1er janvier 2014. Si c’est le cas, vous devez en tenir compte en ce qui concerne la première partie du délai de préavis, c'est-à-dire le délai de préavis correspondant à l'ancienneté acquise avant le 1er janvier 2014.
A la lecture de l’arrêt, il semble que la clause de préavis doit également être appliquée dans l’hypothèse où elle donne un résultat moins favorable pour l’employé que l’application du régime légal (c’est-à-dire un mois par année d’ancienneté entamée, avec un minimum de trois mois).
Source : Cour constitutionnelle, 18 octobre 2018, n°140/2018 R.G. n°6668.
[1] Avant l’entrée en vigueur, au 1er janvier 2014, de la loi relative au statut unique, les employés dont la rémunération annuelle brute dépassait le montant de 64.508€ (montant au 31 décembre 2013) avaient, en vertu de l’article 82, §5 de la loi relative aux contrats de travail, la possibilité, au plus tard au moment de leur entrée en service, de conclure une convention concernant les délais de préavis à respecter par l’employeur.
[2] L’article 69 de la loi sur le statut unique règle la deuxième partie du délai de préavis, calculée en fonction de l’ancienneté acquise à partir du 1erjanvier 2014. Ce délai est en principe déterminé selon les règles légales ou réglementaires applicables au moment de la notification du congé et donc, sur la base du régime harmonisé (délais de préavis en semaines).
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