Demander une forme d’emploi avec des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres : que prévoit la CCT n° 161 ?

Auteur: Catherine Mairy (Legal expert)
Temps de lecture: 9min
Date de publication: 13/10/2022 - 16:19
Dernière mise à jour: 18/10/2022 - 10:14

Le droit, pour un travailleur, de demander une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres est prévu par une directive européenne.

Pour permettre la mise en œuvre de ce droit en Belgique, le Conseil National du Travail a conclu, le 27 septembre 2022, la convention collective de travail (CCT) n° 161.

Cette convention, entrée en vigueur le 1er octobre 2022, est conclue pour une durée indéterminée.

En voici un résumé.

Entreprises et travailleurs concernés 

La CCT n° 161 est applicable aux entreprises (principalement) du secteur privé et aux travailleurs qu’elles occupent.

Pour bénéficier du droit de demander une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres, le travailleur doit toutefois remplir les conditions suivantes :

  • avoir une ancienneté d’au moins 6 mois auprès du même employeur :
    • les périodes d’occupation auprès du même employeur sont additionnées ;
    • en cas de contrats de travail à durée déterminée successifs auprès du même employeur, les périodes entre ces contrats sont neutralisées ;
    • en cas de travail intérimaire, il faut prendre en compte l’ancienneté au sein de l’entreprise de travail intérimaire et chez le même utilisateur ;
    • si un intérimaire est engagé par un utilisateur après la période d’occupation en tant qu’intérimaire auprès de cet utilisateur, il faut prendre en compte les périodes d’occupation en tant qu’intérimaire auprès de cet utilisateur ;
  • et avoir un temps de travail prédéterminé et réel supérieur à une moyenne de 3 heures par semaine au cours d’une période de référence de 4 semaines consécutives.

Conditions de travail plus prévisibles et plus sûres 

Peuvent être considérés comme des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres :

  • un contrat de travail à durée indéterminée (plutôt qu’un contrat de travail à durée déterminée) ;
  • un contrat de travail à temps plein (plutôt qu’un contrat de travail à temps partiel) ;
  • un contrat de travail à temps partiel prévoyant un plus grand nombre d’heures de travail (plutôt qu’un contrat de travail à temps partiel prévoyant un moins grand nombre d’heures de travail) ;
  • un contrat de travail avec un horaire fixe (plutôt qu’un contrat de travail avec un horaire variable) ;
  • un contrat de travail intérimaire hebdomadaire ou mensuel (plutôt qu’un contrat de travail intérimaire journalier).

Les conditions requises pour entrer en ligne de compte pour une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres (ex. type d’emploi et disponibilité, qualification requise dans le chef du travailleur, etc.) peuvent faire l’objet :

  • d’une CCT sectorielle ou d’entreprise ;
  • d’un accord conclu au niveau de l’entreprise en concertation avec la délégation syndicale ou, à défaut, avec les travailleurs ;
  • ou d’un commun accord entre l’employeur et le travailleur.

Procédure

Demande du travailleur

Le travailleur qui souhaite obtenir une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres introduit sa demande écrite auprès de l’employeur :

  • au moins 3 mois avant le début souhaité de cette forme d’emploi (sauf délai plus court prévu au niveau du secteur ou de l’entreprise) ;
  • par lettre recommandée, remise d’un écrit (dont le double est signé par l’employeur au titre d’accusé de réception) ou voie électronique (moyennant un accusé de réception de l’employeur).

Cette demande comprend :

  • la mention expresse de la CCT n° 161 ;
  • l’indication de la forme d’emploi pour laquelle le travailleur souhaite entrer en ligne de compte ;
  • la date de début souhaitée pour cette forme d’emploi.

Attention ! Le travailleur ne peut pas (en principe) faire de demande plus d’une fois par période de 12 mois.

Réponse de l’employeur

L’employeur doit répondre à la demande du travailleur :

  • par écrit ;
  • dans un délai d’un mois (2 mois si l’employeur occupe moins de 20 travailleurs) à compter de la date de la demande ; à défaut, le travailleur peut réitérer sa demande.

L’employeur y indique plus particulièrement :

  • en cas de refus : les motifs concrets de sa décision ;
  • en cas de report : les motifs concrets du report (motifs justifiables liés au fonctionnement de l’entreprise) ;
  • en cas de contreproposition : une contreproposition motivée (autre forme d’emploi ou autre période d’exercice).

S’il s’agit de la demande d’un intérimaire, l’utilisateur doit faire connaître à l’entreprise de travail intérimaire les motifs de la réponse par cette entreprise.

En cas d’accord des parties

Si l’employeur accepte la demande du travailleur ou si le travailleur accepte le report ou la contreproposition de l’employeur, les parties s’accordent sur les modalités concrètes de la forme d’emploi (horaire, rémunération, etc.).

Protection du travailleur

Protection contre le traitement défavorable

Pendant une période déterminée, l’employeur ne peut adopter aucune mesure défavorable à l’encontre du travailleur qui introduit une demande pour une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres, sauf pour des motifs étrangers à l’exercice de ce droit.

Cette période débute à partir de la demande écrite du travailleur ; elle prend fin :

  • si le travailleur exerce la forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres : 2 mois après le début de cet exercice ;
  • si l’employeur refuse la demande : 2 mois après ce refus ;
  • si aucune forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres n’est entamée : 2 mois après la date de début demandée par le travailleur.

En cas de report, la protection couvre la période de report.

Si, au cours de la période de protection, l’employeur prend une mesure défavorable fondée sur des motifs qui ne sont pas étrangers à l’exercice du droit prévu par la CCT n° 161, il sera redevable au travailleur d’une indemnité égale à minimum 2 mois de rémunération et à maximum 3 mois de rémunération.

Attention ! Le non-renouvellement d’un contrat de travail à durée déterminée peut être considéré comme une mesure défavorable.

Protection contre le licenciement

Pendant une période déterminée, l’employeur ne peut pas licencier le travailleur qui introduit une demande pour une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres, sauf pour des motifs étrangers à l’exercice de ce droit.

Cette période débute à partir de la demande écrite du travailleur ; elle prend fin :

  • si le travailleur exerce la forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres : 2 mois après le début de cet exercice ;
  • si l’employeur refuse la demande : 2 mois après ce refus ;
  • si aucune forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres n’est entamée : 2 mois après la date de début demandée par le travailleur.

En cas de report, la protection couvre la période de report.

Si, au cours de la période de protection, l’employeur licencie le travailleur pour des motifs qui ne sont pas étrangers à l’exercice du droit prévu par la CCT n° 161, il sera redevable au travailleur d’une indemnité égale à minimum 4 mois de rémunération et à maximum 6 mois de rémunération.

Attention ! La prise de toute mesure préparatoire d’un licenciement est assimilée à un licenciement.

Absence de cumul des indemnités

Les indemnités prévues dans le cadre des deux protections décrites ci-dessus ne sont pas cumulables entre elles, ni avec toute autre indemnité due par l’employeur à l’occasion de la fin du contrat de travail (y compris une indemnité pour abus de licenciement), à l’exception d’une indemnité de préavis, d’une indemnité de non-concurrence, d’une indemnité d’éviction ou d’une indemnité complémentaire payée en plus des allocations sociales.

Source : Convention collective de travail n° 161 du 27 septembre 2022 concernant le droit de demander une forme d’emploi comportant des conditions de travail plus prévisibles et plus sûres, www.cnt-nar.be.

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