En 2020, les salaires belges ont crû moins vite que ceux des pays voisins

Le handicap salarial a été de -3,8% en 2020, d'après le Conseil central de l'économie. Nos salaires ont donc évolué moins rapidement que chez nos voisins.

Selon un nouveau rapport du Conseil central de l'économie (CCE) que nous avons pu consulter, le coût salarial a évolué moins rapidement dans notre pays que chez nos voisins depuis 1996. Le handicap salarial est, en effet, négatif en 2019 et 2020: il s’élève respectivement à -4% et -3,8% pour le secteur privé, a calculé le CCE.

Pour rappel, le calcul du handicap salarial se fait en prenant en compte la masse salariale (y compris les subsides, réductions de cotisations sociales, etc.), et en comparant la croissance de cette masse depuis 1996 avec celle des trois pays voisins de référence (France, Allemagne, Pays-Bas). Il entre dans le cadre des dispositions prises lors de la révision de la loi de compétitivité de 1996, et permet d'avoir un premier indicateur pour estimer la norme salariale sur laquelle devront se baser les partenaires sociaux pour les négociations du prochain accord interprofessionnel. 

Gare à l'indexation

L'évolution du handicap salarial est l'un des éléments du calcul de la marge maximale disponible pour les hausses de salaires, mais pas le seul. La marge salariale se base également sur les prévisions d’évolution des salaires dans les pays dits de référence, à savoir l’Allemagne, la France et les Pays-Bas, ainsi que sur la prévision d’indexation en Belgique. 

Si ce nouveau recul du handicap salarial apparaît plutôt comme une bonne nouvelle pour les entreprises, celle-ci risque d'être douchée par la flambée de l'inflation qui gonfle l'indexation automatique des salaires.

Pour mémoire, en décembre, l’inflation belge s'est accélérée à 6,5%, selon les données Eurostat (5,71%, selon la méthode Statbel), contre 5% pour la zone euro. Cette inflation élevée frappe également les pays voisins, à la nuance près qu'eux ne disposent pas du système de l'indexation automatique.

La productivité en soutien

Le Conseil central de l’économie apporte des précisions sur deux autres mesures du handicap salarial: le handicap absolu des coûts salariaux (masse salariale de laquelle sont déduits les subsides) et le handicap absolu en prenant en compte la productivité. Ces deux indicateurs se lisent comme une photographie de l’année de référence, et non comme une évolution historique.

Que nous apprennent ces deux données?  En 2020, le coût salarial horaire dans le secteur privé a été de 10,6% supérieur à la moyenne des trois pays voisins. C’est un peu moins qu’en 2019, où le handicap (absolu) a été de 10,9%.  

Si l’on fait entrer en jeu le niveau de productivité, la photographie se modifie nettement: le handicap se réduit alors à 1,3% (moyenne pondérée selon les secteurs) en 2019, et devient même négatif en 2020, à -3,4% (seul ici le secteur marchand est pris en compte). "La productivité en Belgique a donc tendance à réduire le handicap salarial", note le CCE.

Effet de la crise

Ces résultats doivent être lus à la lumière de la crise du covid, précise le CCE. Les résultats ne sont pas comparables aux années précédentes en raison de l’importance qu’a prise le chômage temporaire au sien des entreprises. Étant donné que la plus grande partie des travailleurs mis en chômage temporaire se situe dans la catégorie des plus bas salaires, cela a augmenté le salaire moyen de ceux qui sont restés au travail. Mais en 2021 et en 2022, l’effet inversé se produira, à mesure que les chômeurs temporaires réintègrent leur emploi. Le CCE signale qu’il est impossible de déterminer quel impact exact a eu cet effet de composition.

Enfin, l’explosion des subsides salariaux en 2020, année qualifiée d’exceptionnelle en la matière en raison de la crise, vient aussi perturber l’analyse, particulièrement dans la comparaison avec l’Allemagne. Ce niveau devrait redescendre dans les années à venir, note le CCE.