Les entreprises peuvent-elles chercher des arrangements avec leurs clients, leurs banques, leurs fournisseurs?
En théorie, elles peuvent toujours discuter de méthodes plus créatives de paiement. Mais ici, les effets de la crise risquent de perdurer. Il n’est plus question de reports à trois ou six mois mais à beaucoup plus long terme. Les plus petites entreprises ne disposent pas de la trésorerie nécessaire pour tenir. D’où la peur obsessionnelle de l’entrée en récession qui anime les banques centrales et ceux qui pilotent nos économies. Par ailleurs, le contexte de hausse des taux n’est pas favorable non plus à une discussion avec son banquier.
Doit-on dès lors s’attendre à des faillites en série?
Les cessations d’activité se sont multipliées ces dernières semaines. En particulier des entreprises aux biens et services peu différenciés. On voit des communes où les boulangeries disparaissent… Si la récession se matérialise, on peut craindre une déferlante mais je m’attends davantage à des cessations d’activité volontaires qu’à des faillites ou à des procédures de redressement judiciaire, notamment dans les rangs des indépendants et des PME.
Pourquoi?
Nous nous situons dans un contexte assez particulier si on le compare aux crises passées. Nous sommes dans une situation de quasi-plein-emploi, avec énormément d’offres non satisfaites. Nombre d’indépendants et de dirigeants de petites entreprises qui ont dû mettre la clé sous le paillasson pourront, en fonction de leurs compétences, retrouver un job. On pourrait assister, à un horizon de 12 à 18 mois, à une vague de transferts de l’activité indépendante vers l’activité salariée.
On trouve toujours des PME résilientes, cependant. Quelles sont leurs caractéristiques?
Il y a d’une part celles qui ont pu accumuler, ces dernières années, un “trésor de guerre” qui leur permet de tenir financièrement pendant plusieurs mois. Il s’agit souvent de sociétés plus matures, généralement familiales, bâties sur une ou deux générations. Elles “en ont vu d’autres”, leurs activités ne brûlent pas leur capital et elles peuvent compter, par exemple, sur un petit patrimoine immobilier comme garantie. Mais il y a aussi les entreprises agiles et réactives. Elles innovent et savent profiter de toutes les occasions, quitte à remettre en question leurs modes de production, leurs partenariats de distribution, leur organisation.
Après le shift numérique provoqué par la pandémie, allons-nous assister à un shift d’efficience énergétique à la suite de la guerre en Ukraine?
Certainement. Toutes les PME industrielles ou d’artisanat devront revoir leurs process. Et là, ce seront sans doute celles qui maîtrisent le mieux leur métier – au sens presque “artisanal” du terme – qui s’en sortiront le mieux.
Dans ce contexte, quel conseil donner aux responsables des ressources humaines?
Plus que jamais, je crois qu’il faut faire preuve de positivité et de bienveillance dans le rapport aux équipes. Ça va être difficile pour tout le monde! Il faudra se montrer créatif et innovant dans les solutions. À cet égard, la possibilité de passer à quatre jours de travail par semaine, incluse dans le “deal pour l’emploi”, peut, contrairement à ce que beaucoup de PME semblent penser, fournir de vraies options.